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discretement
26 mai 2007

la veille...

P2031100


La veille, je m’étais précipitée vers elle en arrivant pour l’embrasser.

Ses cheveux venaient d’être lavés.

 Je la trouvais très belle dans son élégante robe noire, et le lui avais dit.

Je m’étais assise près d’elle au bout de son lit.

Je ne sais plus de quoi nous avons parlé.

Elle a du, comme à son habitude, m’interroger sur mes enfants.

Où sont ils ? Que font ils ? Comment vont-ils ?

Ma sœur aînée était assise sur le lit en face.

A un moment, nous avons évoqué leur retour à la maison, échangé sur l’aménagement et les aides à mettre en place ;

Mon père refusait d’être soigné par l’ancienne équipe d’infirmiers.

Ils refusait également les auxiliaires de vie « qui ne savent pas travailler », demandait à ma sœur de faire de nouvelles démarches.

L’échange est devenu pénible.

Ma sœur a gardé « héroïquement » son calme et accepté de faire appel à une autre association.

Nous avons envisagé de louer pour l’un et l’autre des lits médicalisés.

Ma mère qui ne disait rien, a protesté : « je veux garder le lit de ma petite mère ».

Nous lui avons fait la promesse qu’il serait près d’elle dans la chambre à coté ;

Allongée sur son lit, elle nous écoutait, heureuse semble t-il de nous entendre parler, retour.

Je lui caressais distraitement les jambes.

Elle s’est relevée et m’a demandé de lui gratter le dos.

« Hum ça fait du bien, a-t-elle dit dans un rire…Toi au moins tu as des ongles… »

Je lai prise dans mes bras pour une tendre étreinte, sans savoir que c’était la dernière fois.

 

Il n’y a pas de hasard.

Le lendemain, j’ai retrouvé dans son armoire, son fameux cahier de poésies que nous cherchions depuis des mois.

 

Elle y avait écrit après le décès de sa mère :

 

« Tu vois petite mère, ta fille à cinquante ans

Ne changera jamais, jouant à la poupée

C’est là mon seul bonheur

En attendant le jour, où je te rejoindrai

Nos deux âmes enlacées pour te parler d’amour

D’un besoin de tendresse

Que tu n’as pas compris ces deux mois seulement

Où je t’avais à moi, rien qu’à moi cette fois

Et mettant tout mon cœur, mes forces, à te servir,

Te choyer, te serrer dans mes bras,

Grattant ton pauvre dos, de mes doigts sans ongles

Caressant tes jambes et te parlant de Dieu….

 

Dieu est la bonté même

Et veut qu’on se retrouve »

 

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Commentaires
Z
Bien sur ton fils a raison : on pleure sur soi Blessé par cette brisure, ce manque, cette amputation comme dit Ex Nihilo; On a mal parce que l'autre est aussi en nous, et que cette part de nous n'est plus qu'à l'état de souvenir, figé et non plus vivant,en évolution.
P
pour toi, en cadeau, ce que m'a dit mon fils, quand ma mamé est morte :<br /> <br /> "pleure pas sur elle. c'est toi qui est triste, pas elle et c'est sur toi que tu pleures. elle, elle est avec ta maman, maintenant. et elles sont heureuses parce qu'ensemble."<br /> <br /> je suis assez d'accord avec lui, finalement :)<br /> <br /> pensées.
E
Beaucoup d'images de mon père au crépuscule de sa vie me reviennent en mémoire à la lecture de ce magnifique témoignage. J'en connais la douleur et le prix, mais aussi la douceur et l'humilité. Je t'accompagne, de loin, tout en sachant qu'on est toujours seul face à son destin.
L
il n'y a pas de hasard non...<br /> ces gestes en élan du coeur traduisent peut-être seulement tout ce qu'on ne sait pas se dire, avant de le dire à l'autre
F
Ton billet est très émouvant... Incroyable...<br /> Je t'embrasse bien fort.
discretement
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