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discretement
28 février 2006

Ma soeur

ninette1
La faute à « pas le bol », tu es née en quatrième position, coincée entre « le gros blond », comme le surnommait Maman, (nous l’appellerons John) et deux « affreuses » jumelles, mal venues, mal foutues, mal finies.
Tu avais pour toi -ou contre toi -une beauté radieuse et éclatante, elfe blond au regard d’un bleu lumineux, originale et déjà si différente de nous tous, et surtout « une voix d’or ».
Tu es venue répondre sans le savoir au désir le plus fou de Maman, d’être enfin regardée, valorisée, (renarcissisée, comme disent les psy) par une belle enfant, « bel objet » à montrer à sa propre mère.
_ « Regarde comme K. est belle, comme elle te ressemble, comme elle chante bien ! »
Tu as eu pour fonction de réussir là où Maman avait échouée : séduire sa mère, te faire aimer d'elle..
Déjà tout bébé tu donnais de la voix, au point que Papa secouait ton berceau pour te faire taire.
Plus tard, tu as compris que cette voix pouvait ravir, captiver, réjouir. Tu ne t’es pas fait prier pour la faire entendre.
Tu n’étais âgée que de 9 ans ;Maman t’exhibait, te faisait monter sur scène ,te traînait de radio crochet en radio crochet…Tu as obtenu des premiers prix, chanté dans des casinos, enregistré des disques, rencontré des gens connus, importants,l’œil ou l’oreille intéressés mais aussi les mains baladeuses…
Elle était si fière Maman, si heureuse de t’entendre chanter. Elle t’achetait de jolies robes que ma soeur jumelle et moi jalousions secrètement, pour que tu sois « la plus belle ».
_« Vous savez mes sœurs, je n’aimais pas ça…Je voulais rendre maman heureuse. Je ne pouvais lui dire non »
De neuf ans à seize ans, tu as accepté d’occuper cette place d’objet précieux, soumis au désir de Maman, en effaçant ton propre désir.
Ainsi, cette fameuse année 1965, (tandis que ma jumelle se faisait opérer à cœur ouvert, qu'un petit neveu était né dans le "péché"), tu n’as eu d’autre choix, pour te libérer, te risquer à « être », que celui de t’évader dans la folie :
« Une cage s’ouvrait, une autre allait se refermer » avec un verdict impitoyable : Schizophrénie ? Psychose maniaco-dépressive ?

Je n’ai pas compris ce qui t’arrivait quand je t’écoutais la nuit, puisque nous partagions la même chambre ; Tu parlais à haute voix, me décrivais des images que moi je ne voyais pas, des mots que tu entendais que je n’entendais pas. Tu te désespérais au point de vouloir échapper au regard en t’enfermant à double tour ; tu riais ou tu hurlais de terreur, au point de vouloir en mourir.
Ma K., tu t’es éloignée de nous, échappée dans un monde qu’on ne pouvait plus partager.
K., tu me faisais peur, mais je t’aimais ; K.je t’aime ;

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Commentaires
F
Oui bouleversant. Pensées aimantes pour vous toutes.
C
c'est bouleversant<br /> tout cet amour et toute cette detresse...<br /> après avoir lu qu etu ne voulais pas d'une grande assemblée... je pourrais promettre de ne pas revenir... mais pas par désintérêt non...
discretement
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