le soir
Ne t'en fais pas pour l'ombre ni pour la
patience
Elles progresseront ensemble avec le temps
Ni l'or à quoi le beau
soir dénudé ressemble
Et qui semble parfumer le pays d'encens
Ne t'en fais pas. Tout vient à son temps, à son
heure
L'oubli viendra, comme un messager des lointains
Ailleurs s'étrangle
à nouveau le cor du sonneur
Annonçant des rémissions proches. Tout est vain
Tout est vain : on ne voit plus, qui blessaient
les vignes
Ces routes tracées dans la chair vive au couteau
Juste une buée
montant des souffrances, on devine
Mourant, les formes féminines des coteaux
Avec le temps, les trahisons, les
espérances
Qu'en reste-t-il ? Le parc oblique vers la nuit
Rentre, serrant
sous ta veste ton peu de science
Tout vient à son heure, et le pardon de la
pluie
Tout fut-il donc dépensé pour rien ? Tu
protestes
L'escalier geint. Ce soir, personne ne t'attend
Dans le noir tu
parcours ta galerie de gestes
Le fardier d'insomnie s'ébranle pour cent ans
Ne t'en fais pas. Toute chose à la fin fait
cendres
Même l'oiseau dont les braises brillent encore
Et, dans la nuit
sans oubli où tu vas descendre
Son aile implorante frémit, dans le décor
Jacques Bertin